Fraude

De lourdes conséquences

La fraude fiscale pèse environ 80 milliards d’euros. C’est également le montant du déficit public prévu pour 2014. Alors, faut-il laisser les choses en l’état ? Supprimer encore plus de services publics ? Augmenter les impôts pour les plus modestes ? Ou lutter véritablement contre la fraude fiscale ?

L’impôt devrait servir, à la fois, au financement des besoins de la population, à la correction des inégalités et au développement économique durable.

C’est pourquoi la fraude fiscale peut être considérée comme un cancer qui ronge nos finances publiques et par conséquent nos services publics. Ainsi, les fraudeurs sont directement responsables de la suppression d’écoles, de routes, d’hôpitaux... En plus de quoi, ils font porter le coût de leurs actes sur les citoyens qui payent honnêtement leurs impôts.

Pour cette raison, entre autres, la crise des finances publiques est, contrairement aux idées reçues et habilement entretenues, une crise non pas des dépenses, mais bien des ressources. Ces dernières ont systématiquement été affaiblies par nos gouvernants (70 milliards d’euros en moins de 2000 à 2010).

De plus, la législation, rendue de plus en plus complexe, permet aux plus riches et puissants (les mieux conseillés) d’échapper à leurs devoirs envers la communauté, pourtant à l’origine de leurs fortunes. Cette législation compliquée rend les contrôles plus difficiles et aboutit à focaliser le contrôle fiscal, beaucoup plus simple à réaliser, sur les revenus des seuls travailleurs. Près de 100 % des revenus tirés des salaires et des pensions sont soumis à vérification tandis que seules 5 % des entreprises sont contrôlées !

Mais, l’enjeu de la lutte contre la fraude n’est pas que budgétaire. Il s’agit aussi d’une nécessité de justice et de démocratie. Le but premier du contrôle fiscal, doit être la prévention des comportements frauduleux qui brisent l’égalité de traitement face à l’impôt.

Des lois et des règlements opaques privent les citoyens du contrôle démocratique qu’ils devraient être en droit de pouvoir exercer. Les impôts et contributions ne devraient pas être payés à contre-cœur. Pour cela, ils doivent être justes et compréhensibles. C’est pourquoi, une réforme globale de la fiscalité vers plus de justice et d’efficacité est nécessaire.

Le « Carrousel » de TVA

Normalement, toute société qui vend des produits ou services sur le territoire français doit payer de la TVA. Pourtant, des entreprises peu scrupuleuses ont réussi à créer des mécanismes permettant de frauder massivement cette taxe. D’après la Commission européenne, le manque à gagner pour la France s’élève à 32 milliards d’euros par an, rien que pour la fraude à la TVA.

La TVA comment ça marche ?

Pour expliquer le système de fraude (voir schémas), prenons l’exemple d’une usine allemande qui produit des jouets. Lorsqu’un jouet est vendu pour 100 € à un grossiste français, cette vente, réalisée entre deux pays différents, est facturée hors-taxe.

Une fois en France, le grossiste revend le jouet à un magasin pour les fêtes de Noël au prix de 150 €. Cette fois, la vente se fait TTC. Le grossiste verse donc la TVA aux Finances publiques (dans notre exemple 20 €) et engrange des bénéfices (ici, 30 €).

Et pour la fraude ?

Dans le cas d’une fraude, le grossiste devient une société éphémère qui pour notre exemple se créé l’été afin d’acheter des jouets pour Noël. Les jouets sont toujours achetés au prix de 100 €. Mais pour gagner plus d’argent et plus vite, le grossiste frauduleux va revendre les jouets au prix de 140 €.

Les magasins sont bien évidemment très intéressés car ils réalisent une économie de 10 €. Le grossiste écoule ses stocks en quelques semaines. Il empoche 40 € par jouet en ne reversant pas la TVA aux Finances publiques.

Le revendeur, souvent une société étrangère dont le dirigeant n’est qu’un prête-nom, cesse son activité et disparait dans la nature. Ce type de fraude est très difficile à découvrir et quand c’est le cas, il est souvent trop tard.

Fraude sur les quotas de carbone

Fin 2008, une fraude fiscale de grande ampleur s’est développée à partir du système européen de quotas d’émissions de carbone. Sur ce marché, les entreprises qui relâchent plus de CO2 que le quota qui leur est autorisé doivent acheter des « droits d’émission » à celles qui en relâchent moins que le plafond.

La fraude à la TVA sur les quotas de carbone est une escroquerie évaluée à 1,6 milliard d’euros au préjudice du budget français et 5 milliards d’euros pour l’ensemble des États de l’Union Européenne.

On retrouve ici un schéma de fraude très similaire à celui du Carrousel de TVA. L’entreprise fraudeuse s’inscrit sur le registre carbone, éventuellement sous une fausse identité, puis ouvre des comptes dans des établissements bancaires peu regardants.

Le matin, elle achète un quota de CO2, hors-taxe, à l’étranger dans un État membre de l’Union européenne. Les quotas sont ensuite revendus TTC à des sociétés française. La TVA n’est jamais reversée à l’État et les sommes gagnées (marges + TVA) sont vite transférées sur un compte à l’étranger au travers de sociétés écrans. Le premier compte à l’étranger est rapidement fermé, rendant très difficile la récupération des fonds détournés.

Abandonnée en juin 2009, cette TVA est rétablie fin 2010. La TVA est maintenant versée par la société soumise au plafond d’émission. De plus, un mécanisme de surveillance a été confié à l’Autorité des marchés financiers. Ces mesures seront-elles suffisantes ? On peut en douter.

Il nous faut donc exiger que ce marché comme ceux de l’électricité et du gaz fassent l’objet d’une surveillance plus vigilante !

Comment lutter contre la fraude ?

Depuis quelques années, les différentes lois de finances ont fabriqué une multitude de niches fiscales et rendu la législation de plus en plus complexe. Les opportunités de fraude se sont alors multipliées et les fraudes devenues de plus en plus sophistiquées.

En 10 ans, le nombre de conseillers fiscaux a fortement augmenté (+ 60 %) tandis qu’à Bercy 20 % des emplois étaient supprimés.

Tout ceci a donc permis le développement d’une fraude fiscale massive.

Des emplois

Il est urgent de créer, en nombre suffisant, des emplois publics pour lutter contre la fraude et cela à chaque étape essentielle du contrôle fiscal (accueil, gestion des dossiers, contrôle, recouvrement). C’est un enjeu économique majeur de sortie de crise mais aussi de justice !

La législation

Il faut également donner des moyens juridiques nouveaux aux services fiscaux afin de lutter efficacement contre la fraude. Cela nécessite que la législation soit mieux adaptée pour lutter contre la délinquance fiscale avec un durcissement des pénalités et des peines.

Une réforme fiscale

Il faut une profonde réforme de la fiscalité pour plus de justice et d’efficacité. Un système plus simple et plus juste, rendrait la tentation de frauder beaucoup moins grande. La population serait ainsi bien plus attachée à ce que ces règles soient respectées par tous !

Optimisation, fraude et évasion fiscales

La frontière est mince entre optimisation, fraude et évasion fiscale. Dans tous les cas, la complexité de la législation fiscale facilite l’évaporation de milliards d’euros des caisses des États.

Le dumping fiscal et social que se livre les États entre eux, incite les grandes entreprises et les plus riches contribuables à se tourner vers les pays offrant un système fiscal le plus favorable. Ceci a des effets catastrophiques pour les États qui perdent des recettes fiscales mais aussi pour les pays d’accueil qui fragilisent leur budget en cédant à cette course suicidaire (exemple de l’Irlande).

En France, l’évasion fiscale est estimée à 50 milliards d’euros par an. Le Parlement européen, à son niveau, l’estime à 1000 milliards d’euros chaque année !

Dans tous les cas, ce sont toujours les populations qui payent l’addition en se substituant aux mauvais payeurs et en perdant des services publics essentiels à leur qualité de vie.

Lutter contre l’évasion

Il faut d’urgence :

- dresser une liste exhaustive des paradis fiscaux et judiciaires, selon de nouveaux critères (fiscalité, blanchiment, régulation financière) ;

- prendre des sanctions à l’encontre des paradis fiscaux et de leurs utilisateurs, notamment en taxant les flux en direc­tion ou en provenance de ces territoires ;

- obliger les utilisateurs des paradis fiscaux, banques et entreprises multinationales, à rendre des comptes et cela notamment en rendant automatique l’échange de données bancaires et en les obligeant à publier des informations pays par pays ;

- travailler à une harmonisation fiscale et sociale en Europe.

Chiffres-clés

1000 milliards d’euros d’évasion fiscale dans les pays de l’Union européenne par an

514 milliards d’euros de déficit dans les pays de l’union européenne en 2012

60 à 100 milliards de manque à gagner en Europe à cause de la fraude à la TVA intracommunautaire

80 milliards de fraude fiscale en France chaque année

1,8 million d’entreprises sont soumises à l’impôt sur les sociétés

3,6 millions d’entreprises en France hors agriculture

1,1 million d’artisans en France

197 052 contrôles fiscaux sur pièces des professionnels en 2012

47 633 contrôles fiscaux approfondis dans les entreprises en 2012

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